CAA de VERSAILLES N° 19VE04255 - 21 juillet 2021 : RIFSEEP - Le plafond du complément indemnitaire annuel ne peut pas être limité à 1€
En l’espèce une commune a, par une délibération de novembre 2018, mis en place le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP) au profit des agents communaux.
Cette délibération prévoyait que pour chacun des groupes de fonctions existant dans la commune, le plafond du complément indemnitaire annuel (CIA) serait fixé à un euro.
Le Préfet a alors formé un déféré afin d’obtenir l’annulation de cette délibération considérant qu’en limitant le plafond du CIA à un euro sans modulation, la commune a neutralisé la mise en œuvre d'un dispositif qui doit prendre en compte la manière de servir des agents et n'est donc pas conforme aux objectifs de la loi qui l'instaure.
Le Tribunal Administratif ayant rejeté cette demande, le Préfet a interjeté appel de cette décision devant la Cour d’Appel qui fait droit à sa demande et annule le jugement de première instance.
Pour la Cour, en limitant à un euro le plafond du complément indemnitaire annuel, la délibération litigieuse a méconnu les dispositions de l’article88 de la loi du 26 janvier 1984 et du décret du 6 septembre 1991 aux termes desquelles ce complément doit être versé en fonction de l'appréciation de l'engagement professionnel des agents suivant des critères définis par la commune.
Analyse: Depuis la décision du 13 juillet 2018 rendu par le Conseil Constitutionnel, le débat juridique sur le caractère facultatif du CIA est clos. Une collectivité qui souhaite mettre en place un régime indemnitaire tenant compte pour une part, des conditions d'exercice des fonctions et, pour l'autre part, de l'engagement professionnel, comme c’est le cas du RIFSEEP, est tenue de prévoir d’instaurer les deux parts. Ainsi, il n’est pas possible de prévoir uniquement la mise en place de la part liée aux conditions d'exercice des fonctions (IFSE) sans celle liée à l’engagement professionnel (CIA) et inversement.
Pour contourner cette obligation et souvent pour ne pas se créer de dépenses supplémentaires, certaines collectivités ont parfois tenté d’instaurer le CIA mais en fixant un montant plafond dérisoire voire nul, ce qui a évidemment pour effet d’empêcher tout versement quel que soit la manière de servir des agents concernés et de retirer tout intérêt managérial au RIFSEEP.
Si, comme l’avait précisé le Ministère dans une réponse à un parlementaire (QE AN n° 703 du 28 novembre 2017), les employeurs territoriaux sont libres de fixer un plafond de CIA dans la limite du plafond global des deux parts définies pour le corps équivalent de la FPE «ce qui peut leur permettre de fixer un plafond de CIA relativement bas, s'ils le souhaitent», ils ne sont pas, pour autant, libres de fixer un montant nul ou dérisoire sans risquer la censure du juge.
En limitant à un euro le plafond du complément indemnitaire annuel versé aux agents de la commune, le conseil municipal a pris une délibération illégale : ce complément doit en effet être versé en fonction de l'appréciation de l'engagement professionnel des agents suivant des critères définis par la commune. Tel est le sens d'un arrêt du 21 juillet de la Cour administrative d'appel de Versailles.
Eu égards aux effets excessifs qu'emporterait une annulation rétroactive de la délibération, notamment sur les rémunérations versées aux agents de la commune pendant la période de mise en oeuvre du régime indemnitaire instauré par cette délibération, il y a lieu de prévoir que l'annulation prononcée par le présent arrêt ne prendra effet qu'à la date de notification de celui-ci à la commune.
L’arrêt : |